Notre FUTUR

Le jour où j’ai décidé d’en parler

Sarah a été abusée par un jeune homme connu de sa famille alors qu’elle était enfant. Mais si elle a fini par en parler à sa mère, qui l’a crue, elles continuent malgré tout à fréquenter cette personne. Pour elle, la honte doit changer de camp. 

 

Je suis une jeune fille ordinaire, qui n’a rien de plus que les autres mais qui porte une histoire douloureuse, ou je dirais une histoire dont parfois j’ai honte. En fait, je ne sais pas vraiment si j’ai honte, peur ou si je suis en colère. Il y a un peu tout cela mélangé en moi. J’ai 17 ans et je vis dans une ville au centre de l’île. Je fréquente un collège de la banlieue de Port Louis. Ma famille est d’origine mixte : tamoule, chrétienne et musulmane. Je vis seule avec ma mère et mon petit frère. Mes parents ont divorcé, mon père est parti depuis longtemps, et c’est ma maman qui subvient à tous nos besoins. Les fins de mois sont plus que difficiles, et avec pudeur, je dirais même qu’elles sont terribles.

 

Quand j’avais 6 ou 7 ans, j’étais une petite fille innocente, ignorant tout des choses d’adultes. J’ai toujours aimé porter des petites robes de princesse. Je ne savais pas que ces robes pouvaient attirer les prédateurs. On croit souvent que les étrangers sont les méchants, ceux qui peuvent vous faire du mal, mais parfois, ce sont les proches qui le sont.

 

J’ai vécu des choses sombres, qui ont bouleversé ma vie de petite fille. 

 

Un jour, j’étais dans ma chambre, seule et perdue. Ma maman est venue me voir, inquiète. J’avais peur de parler, mais je savais que je devais le faire. Je me suis dit qu’elle n’allait pas me croire. J’ai rassemblé mon courage et lui ai tout raconté de mon calvaire. Je me suis mise à pleurer, et elle aussi. Elle m’a prise dans ses bras, m’a embrassée sur le front, et soudain, je me suis sentie un peu mieux. J’ai compris qu’elle a tout de suite su que c’était la vérité. Elle m’a réconfortée, mais la réalité était toujours là.

 

Dans ma tête, il y a un tourbillon tous les jours. Je me demande pourquoi tout cela continue. Pourquoi on doit subir sans rien dire ?

 

Je me sens prisonnière de cette situation parce que cela n’a jamais cessé. Le méchant en question, c’est un proche. Il est grand, avec des cheveux bouclés, très manipulateur. Quand je lui disais « non », il utilisait ses larmes de crocodile pour me faire me sentir coupable. C’est quelqu’un de plutôt violent, il aime se bagarrer.

 

Malgré mes confidences, avec maman on continue d’aller là-bas. On y va parce que quand les fins de mois sont difficiles, maman nous emmène manger chez cette famille. Tout le monde sourit mais tout le monde sait. Il y a un sentiment d’impunité insupportable. Je me sens brisée, comme si ma vie était en morceaux.

 

Ce jour-là, en parlant à ma mère, j’ai brisé le silence. Mais ce n’est qu’un début. Je veux dire à toutes mes amies, à toutes celles qui ont été victimes de viol, de ne pas se taire. Parlez-en. Ne laissez pas la peur ou la honte vous enfermer. Nous avons le droit de vivre sans cette douleur, de reconstruire nos vies et de trouver la paix.

 

Sarah, 16 ans

 

2 Commentaires

  • Marie

    Bouleversant et malheureusement plus fréquent qu’on ne le pense. Nous devons tous nous mobiliser pour aider ces victimes innocentes qui vivent un calvaire. Je pense très fort à Sarah et lui envoie tout mon soutient.
    Marie

  • Angélique de la Hogue

    Sarah, tu as fait preuve d’un immense courage, en parlant à ta mère et en partageant ton histoire. J’espère que votre situation financière s’améliore au plus vite pour que tu ne sois plus obligée de revoir cet agresseur. Je t’envoie plein de lumière.

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