Pour les jeunes, par les jeunes de l’océan Indien
À 16 ans, Chacha vit dans l’ombre : pas de papa, une mère qui se tue à la maçonnerie pour survivre ; et le sentiment de n’avoir jamais eu de place. Mais un échange entre l’ONG Caritas de Solitude et l’association française Les Apprentis d’Auteuil a tout changé. Elle a trouvé ce qu’elle n’attendait plus : un papa et une maman de cœur.
Depuis que je suis petite, je vais à Caritas. C’est un peu ma deuxième maison. Ma maman y a bossé dans les jardins, maintenant elle fait de la maçonnerie. C’est dur de la voir trimer dans un métier d’homme. Mon papa, je l’ai jamais connu. J’ai grandi avec ce vide-là. Et même si j’ai que 16 ans, j’ai arrêté l’école.
À Caritas, quand on m’a dit qu’on allait passer du temps avec des jeunes de France, je n’étais pas rassurée. Franchement, je croyais qu’ils allaient nous regarder de haut, « parce qu’ils sont blancs, ils ont la vie de luxe et vivent dans une grande ville ». Mais en fait, rien à voir. Je me rends compte que les images qu’on voit sur Tik Tok et les vidéos ça ne te dit pas vraiment c’est quoi Paris, les jeunes en difficulté, etc. Ces jeunes (Les Apprentis d’Auteuil) ont aussi une vie compliquée, parfois même loin de leurs familles. Quand on a commencé à leur parler, à faire des activités ensemble, j’ai compris : on se ressemble plus que ce que je pensais.
Et puis, j’ai rencontré deux personnes qui m’ont marquée : Marjorie et Bruno. Ce sont deux encadrants français de cette association.
Marjorie, elle est grande, elle a la peau blanche, elle a du caractère, elle se laisse pas marcher dessus. Au début, je pensais pas qu’elle allait venir vers moi. Mais elle l’a fait. Elle m’a aidée à recoller les morceaux avec une amie du groupe avec qui je m’étais embrouillée. Grâce à elle, j’ai appris à mettre mon orgueil de côté. Je me suis beaucoup confiée à elle car elle était douce avec moi. Elle m’a montré la photo de son fils, elle m’a même parlé de sa maman. Elle m’a dit qu’elle aimerait revenir à Maurice en vacances. Moi, j’espère vraiment la revoir un jour. Avec elle, j’ai eu l’impression de recevoir un amour maternel. Je sais que ça peut choquer. Mais c’est la première fois que j’ai ressenti ce genre de chose.
Bruno, lui, c’est un grand black, le costaud du groupe. Il passait son temps à m’encourager durant les activités. Moi qui avais toujours peur des hommes à cause des choses horribles qui me sont arrivées, avec lui je n’avais pas cette crainte. Au contraire, lui et Marjorie me donnait un sentiment de sécurité. Pour moi, Bruno était comme un papa. C’est lui qui m’a donné mon surnom : Chacha. Et c’est grâce à lui que j’ai osé faire l’accrobranche avec les autres. Jamais j’aurais cru que j’allais grimper dans les arbres et me lancer en tyrolienne. Mais il était là, il m’a encouragé et je me suis dit : allez, je me lance. Finalement, c’était génial !
Avec eux deux, j’ai découvert ce que c’est que d’avoir de l’attention. Un simple « bonjour », un câlin, demander si ça va… Ça paraît rien, mais pour moi ça voulait dire beaucoup. Aucun adulte ne me demande jamais ça.
Et puis, il y a eu Paris. Juste y aller, c’était un rêve incroyable. Quand on est arrivés, j’avais peur qu’ils ne soient pas là. Et finalement, Marjorie et Bruno sont venus nous chercher à l’aéroport. Marjorie m’a serrée longtemps dans ses bras. Depuis ce jour-là, j’ai eu l’impression de trouver une maman et un papa. Ce n’est pas facile d’oser dire ça.
Le dernier jour, là-bas au foyer chez Les Apprentis d’Auteuil on m’a donné un certificat : « la plus souriante ». J’étais fière. Parce que malgré toutes mes blessures, quelqu’un avait vu le positif en moi. Bruno et Marjorie m’ont offert un bijou en cadeau. C’était une surprise. Ça m’a beaucoup marqué.
Tout ceci m’aide à reprendre un peu confiance. Grâce à Caritas qui a organisé cet échange j’ai trouvé quelque chose d’intense. J’ai trouvé un papa et une maman de cœur. Et ça, ça m’aide à croire que tout est encore possible.
Chacha, 16 ans
2 Commentaires
Tres fiere de toi Chacha
Et tu resteras toujours dans mon cœur ❤️ ma chérie. Je suis contente que le Bon Dieu t’est mis sur mon chemin.